Le Partage des Fruits de la Croissance au service de la Croissance
CroissancePlus vient de publier son Guide du Partage des Fruits de la Croissance (l’une des valeur fédératrice des entrepreneurs de croissance qui composent l’association). On retrouve dans ce guide un certain nombre de dispositifs efficaces de partage de la valeur avec les salariés (intéressement, participation, actions gratuites, BSPCE) utilisables par les PME de croissance pour récompenser et fidéliser leurs salariés. Tous ont pour enjeu de réaligner les intérêts des parties prenantes : dirigeants, salariés et actionnaires.
C’est l’occasion pour nous de revenir ici succinctement sur l’un des outils de partage de la valeur que nous utilisons chez PayinTech depuis 2015 : les BSPCE.
BSPCE : Qu’est-ce que c’est ?
“Bon de Souscription de Part de Créateur d’Entreprise”. Un sigle bien à la française, qui veut dire — en gros — “Stock Options de Start-up & PME de Croissance”.
Un BSPCE est un outil de capital destiné à être attribué à des salariés de l’entreprise afin d’aligner leurs intérêts financiers avec ceux des actionnaires de l’entreprise.
Tout d’abord, le BSPCE est un “bon” pour acheter une action de la société (comme son nom l’indique), ce n’est donc pas une action. Il est attribué gratuitement (en général) et il donne le droit d’acheter une action de la société à un prix (“le prix d’exercice”) fixé en avance. Il faut donc comprendre que le BSPCE n’est pas une action gratuite, c’est un bon gratuit qui donne le droit de payer une action à un prix défini.
C’est un outil de rémunération à long-terme car il est souvent accompagné d’une période de blocage (“vesting period”), c’est-à-dire que le détenteur ne peut l’activer qu’au bout d’un certain temps. Si la valeur de l’entreprise augmente et que la période de blocage est terminée, le salarié a intérêt à l’exercer et à acheter l’action au prix d’exercice. Si la valeur de l’entreprise baisse, alors le salarié n’a pas intérêt à acheter l’action, mais il n’aura pas perdu d’argent car il aura eu gratuitement ses BSPCE.
“Pile je gagne, Face je ne perds pas”
Cas pratique :
Alexandre est un collaborateur motivé de la start-up YouShareGrowth. Le dirigeant-fondateur de YouShareGrowth veut l’intéresser à la valeur de l’entreprise sur plusieurs années pour qu’il mette son énergie à 100% dans le projet entrepreneurial.
Mais Alexandre n’a pas d’argent pour investir et n’est financièrement pas prêt à prendre le risque que prendrait un investisseur. Donc son employeur va lui attribuer gratuitement en 2019 10 000 BSPCE qui lui donneront le droit en 2023 d’acheter 10 000 actions à disons 1€.
En 2023, la société a pris de la valeur et l’action est valorisée désormais 5 €. Alexandre, va donc exercer son bon, et acheter 10 000 actions au prix d’exercice défini en 2019, c’est-à-dire à 10 000 €. Alexandre a donc en 2023 payé 10 000 € quelque chose qui en vaut 50 000 €. Il a donc fait 40 000 € de plus-value.
BSPCE : C’est pour qui ?
Les BSPCE sont destinés prioritairement aux salariés de l’entreprise. Ils peuvent aussi être attribués aux dirigeants ou — bientôt — aux administrateurs d’une société. Les BSPCE sont l’un des meilleurs outils pour les entreprises à forte croissance qui ont besoin d’attirer et de conserver les talents.
L’employeur attribue des BSPCE aux salariés qui vont construire l’entreprise sur le long-terme avec eux. Ainsi, ce ne sont pas forcément les salariés les plus anciens, les plus seniors, les mieux notés ou les plus performants. L’enjeu est d’associer les salariés clés à la création de valeur long-terme de l’entreprise.
PayinTech en témoigne dans le Guide du Partage des Fruits de la Croissance de CroissancePlus :
“Nous avons émis des BSPCE pour la première fois lors de notre première levée de fonds, en 2015. L’objectif était d’embarquer les collaborateurs-clés dans une aventure collective pour la croissance de PayinTech. Nous voulions qu’ils s’approprient le projet et qu’ils deviennent des salariés entrepreneurs. Nous avons distribué des BSPCE aux collaborateurs engagés sur le long-terme dans l’entreprise, à tous les niveaux de la hiérarchie, pas uniquement le top management.”
BSPCE : Quand sont-ils utilisés ?
C’est en général pendant les phases de forte croissance qu’il est pertinent d’attribuer des BSPCE. Pour le salarié, ce sont les phases permettant de faire les plus belles plus-values. Pour l’entreprise, ce sont des phases risquées et tendues, où il est nécessaire de fidéliser au maximum ses talents, mais aussi de leur demander le plus d’engagement.
Par ailleurs, ces phases de forte croissance sont des phases permettant souvent une liquidité : le capital tourne plus pendant ces phases. Comme on l’a expliqué plus haut, le salarié peut, au bout de sa période de blocage, acheter au prix d’exercice une action à un prix préférentiel. Mais dans le cas cité ci-dessus, il doit sortir de l’argent pour devenir actionnaire à prix préférentiel certes, mais à un certain prix quand même (10 000 euros dans notre exemple précédent).
Si on est dans une période de liquidité (levée de fonds, cession, fusion, ou toute opération du capital permettant une sortie), le salarié peut instantanément acheter des actions au prix d’exercice et les vendre au même moment au prix de l’opération en cours. Ainsi, plus besoin de sortir un seul centime comme dans l’exemple plus haut.
Reprenons notre exemple :
La société YouShareGrowth a été valorisée à 1 million d’euros (1 million de titres valant 1 euro) suite à l’entrée au capital de BestAngel lors d’une levée de fonds en 2019. Les actionnaires ont décidé de distribuer 50 000 BSPCE aux salariés de YouShareGrowth. Les dirigeants ont choisi par exemple d’en donner 10 000 à Alexandre.
En 2023, YouShareGrowth est rachetée par son concurrent ShareAndCo pour une valeur de 5 millions d’euros. Grâce au travail d’équipe et en particulier l’engagement quotidien d’Alexandre, la société a quintuplé sa valeur.
Alexandre exerce ses BSPCE donc “achète” 10 000 titres pour 10 000 euros et les “revend instantanément” à 50 000 euros à ShareAndCo.
Alexandre a donc “gagné”, sans sortir d’argent, 40 000 euros, qui récompensent son investissement quotidien dans son travail, en plus de ses outils de rémunérations plus classiques (salaire, primes, bonus, intéressement). Il bénéficie des fruits de la croissance de la valeur de la société au même titre que l’investisseur BestAngel.
Et en plus, la fiscalité est avantageuse !
Pour conclure
Tout le sujet des BSPCE n’a pas été traité ici (et encore moins tous les dispositifs d’actionnariat salarié qui sont multiples).
L’enjeu n’est pas ici de donner un cours de droit des sociétés ou de fiscalité (on en serait bien incapable) mais de partager notre expérience. Ainsi, toutes les entreprises ne peuvent pas juridiquement attribuer des BSPCE, mais partons du principe que toutes les entreprises ressemblant de près ou de loin à PayinTech le peuvent.
Aux jeunes sociétés en forte croissance, nous recommandons d’émettre des BSPCE et d’en attribuer à tous les niveaux de hiérarchie, pas seulement au top management. Contrairement à ce que beaucoup disent, les BSPCE sont beaucoup plus un outil de fidélisation qu’un outil d’attrait. Soyez généreux et partagez votre capital, on ne réussit pas seul mais en équipe.
Aux ambitieux talents qui se voient proposer des BSPCE par leur employeur : acceptez-les si vous croyez au projet et considérez-les à leur juste valeur. Attention néanmoins au prix d’exercice qui vous est proposé. Si l’on vous propose des BSPCE à un prix d’exercice de 10 euros mais que la valeur ne dépassera pas 8, dans ce cas contrairement à Alexandre, vous n’en tirerez rien. Attention aux start-ups survalorisées qui lèvent beaucoup d’argent mais ne se revendront pas, ou pas au même prix !
Enfin, aux pouvoirs publics, nous continuerons avec CroissancePlus (l’inventeur des BSPCE pour ceux qui n’étaient pas nés !) à proposer l’assouplissement du dispositif de BSPCE qui est un outil performant au service du Partage des Fruits de la Croissance avec les salariés, et l’alignement de leurs intérêts avec celui des actionnaires. Il faut continuer à élargir l’assiette des entreprises éligibles (plus uniquement les jeunes et petites entreprises) et continuer à baisser la fiscalité sur les plus-values pour les salariés détenteurs (on ne fiscalise pas un salarié détenteur de BSPCE comme un actionnaire purement financier).
Story by Jean-Rémi Kouchakji,
Directeur Général de PayinTech
Téléchargez le guide Croissance Plus sur le Partage des Fruits de la Croissance : http://www.croissanceplus.com/wp-content/uploads/2019/02/CroissancePlus_Guide_Integral.pdf
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